jeudi 9 décembre 2010

Le Cambodge

Le passage de frontière du Laos au Cambodge n'a pas été dénué d'intérêt. Dans mon souvenir, il y avait 5 points de passage :
- le premier pour quitter le territoire laotien, où l'on donnait notre passeport pour se le faire tamponner. Et payer. Manque de bol comme on était samedi ou dimanche, c'était plus cher,
- le deuxième, pour montrer qu'on avait bien le tampon,
- le troisième, pour déclarer si on avait de la fièvre. Quelques idiots novices ont été honnêtes et se sont retrouvés coincés là un petit moment, d'autres malchanceux faisaient partie de la sélection aléatoire de contrôle. Bizarrement, Camille et moi n'avons pas été concernées.
- le quatrième, pour remplir les papiers d'autorisation d'entrée dans le territoire,
- le cinquième enfin, pour recevoir tel le Graal le fameux visa cambodgien, et payer (au choix : en kips, en riel, en euros ou en dollars ; le tout était de calculer ce qui était le plus avantageux, à savoir nous débarrasser de nos derniers kips, impossibles à écouler ailleurs tellement cette monnaie ne vaut rien.

Plus tard (BIEN plus tard, à la tombée de la nuit), nous sommes arrivées à Kompong Cham. Notre première étape. Les routes étant peu nombreuses et souvent en mauvais état, nous avions décidé de nous rendre à Siem Reap (vers l'ouest, près des temples d'Angkor) en deux étapes, histoire de ne pas passer 24 heures dans le bus. Et puis de découvrir un peu le pays aussi, par la même occasion.

Kompong Cham et moment de blondes

En réalité je n’ai rien de particulier à raconter sur cette petite ville, si ce n’est cette petite anecdote :

Alors que nous étions tranquillement installées à la terrasse d'un restaurant, dans le centre ville trépidant de Kompong Cham, Camille et moi nous racontions comme à notre habitude nos impressions. Les gens moins sympas qu'au Laos, l'architecture immonde, les nombreuses "maisons du peuple", les fils, électriques l'impression de misère, les odeurs, la recherche d'une librairie pour échanger des bouquins, Amanda et Claudiu que nous avions quittés et ne reverrions probablement pas, la perspective de voir les temples d'Angkor, etc., etc. Quand tout à coup, après quelques minutes de silence d'appréciation, quelques gorgées de bière (nous avions entrepris de comparer les bières des quatre pays que nous visitions), et quelques bouffées d'Alain Delon (c'était le nom des cigarettes), Camille s'est exclamée, naturellement :
- En tout cas c'qui est cool, c'est qu'au moins ici il y a un peu de vent quand même.
Moi : - ...
Camille : - Quoi, tu sens pas le vent ?
Moi : - Camille, c'est le ventilateur au-dessus de ta tête...

Bon, je vais être honnête : j’ai fait la même à Siem Reap, sauf que je ne l’ai pas dit à haute voix tout de suite.

Siem Reap est la ville où loge la plupart des touristes se rendant à Angkor. Autant dire que c'est blindé de restaurants en tout genre, de cyber cafés, d'hôtels et de marchés/magasins de souvenirs. Ce n'est pas une ville dans le besoin. C'est là qu'on se dit que le communisme est adapté à la sauce de chacun mine de rien : quand on compare à Kompong Cham, c'est pas la même histoire.

Parmi tous les services proposés, il y a le fish massage. Bon. Le fish massage consiste à se faire bouloter les peaux mortes des pieds par des poissons, plus ou moins gros. Comme l'idée me faisait marrer je me suis dit que j'allais essayer. Ch'uis comme ça moi, grande aventurière. Camille m'a dit qu'elle par contre no way. Faire du fruit picking dans les arbres au risque de se retrouver nez à nez avec un serpent, ou jouer aux cartes avec des red backs (araignées venimeuses) sous la table oui, mais se faire grignoter les pieds par des petits poissons, non. Du coup elle a filmé. Et s'est marrée aussi.Mais comme j'ai perdu la video, vous ne l'aurez pas. Brève description de ma réaction : je hurle et sors fissa mes pieds de la mini piscine... C'est que ça fait bizarre quand même ! J'avoue que je n'ai pas été particulièrement fan. Mais d'une, c'est déjà moins douloureux que le massage thaï (je continue de penser qu'il faut être soit atteint de la caboche, soi maso - l'un n'excluant pas l'autre, pour apprécier les massages thaïs), et de deux dans ma liste des choses à faire avant de mourire ça, c'est fait.

Or donc Siem Reap. Le lendemain de notre arrivée, à l'heure où la campagne était encore baignée dans le noir, nous nous sommes rendues à Angkor. Camille était toute excitée depuis la veille alors que, pour ma part, je commençais à peine à ressentir des fourmillements (j'ai le syndrome de celle qui a peur d'être déçue si ça n'arrive pas). Mais plus le froid nous pinçait malgré nos vestes, plus on se répétait "Putain ta race (amis de la poésie bonsoir), on va voir Angkor, tu réalises là ?". Une fois arrivées et notre pass journée en poche, nous avons acheté une lampe torche pour nous rendre jusqu'à Angkor Wat sans nous fouler une cheville (évidemment en bonnes blondes qui se respectent, nous avions laissé nos lampes frontales à l'hôtel). D'autres touristes étaient déjà là (à 5h30 !), installés pour admirer le lever du soleil. Il s'agissait donc pour nous de trouver une place, plutôt devant histoire de prendre de belles photos sans personne dessus. Un homme est venu nous demander si nous voulions un café, un thé ? Un café et un thé oui, merci. Brûlants ils étaient, et le thé très amer. Mais pas grave. Le ciel s'éclaircissait rapidement, le Japonais qui avait commencé à s'installer devant moi avec son trépied avait finalement trouvé un meilleur spot, et les nénuphars juste devant nous donnaient l'impression de colorer le ciel de rose. Juste derrière, Angkor Wat. Instant magique. Les contours du temple n'avait plus cette allure fantôme et se dessinaient de plus en plus nettement, aux côtés de cocotiers. Impossible de ne pas laisser son imagination gambader des siècles en arrière, du temps de la splendeur des lieux. Les exclamations fusent mais une bulle de silence se crée dans ma tête, une bulle dans laquelle je m'étonne comme une enfant et ne cesse de ne pas y croire. J'y suis ! J'y suis vraiment !


Angkor Wat


Une fois que le soleil a eu révélé le temple, nous sommes allées nous y promener, avant de continuer notre découverte d'Angkor. Nous avions décidé de suivre le soleil, pour pouvoir faire de bonnes photos (et aussi parce que le National Geographic le suggérait), et bien nous en a pris : ça n'était pas le trajet préféré des touristes ! Du coup nous n'avons pas eu tant de difficultés que ça à prendre des photos sans personne. J'ai bien dit "pas tant de difficultés que ça" hein, parce que quand même je me souviens encore de cet Allemand (il avait une chemise bariolée, des chaussures ouvertes et des chaussettes jusqu'au genoux : c'était donc forcément un Allemand) qui est resté planté dans mon champ pendant de longues minutes, m'enfin !

Un supputé Allemand


Plus le soleil approchait de son zénith, plus la chaleur devenait difficile à supporter et la lumière aveuglante. Nous nous sommes félicitées d'avoir négocié avec notre chauffeur de "tuk tuk" cambodgien pour qu'il reste avec nous toute la journée ! Oui parce que côté modes de transport il y avait le choix entre : taxi (non merci), bus à touristes (non merci non plus), vélo (tu nous as vues ou quoi ??), marche à pied (euh??? c't'à dire qu'en fait c'est un peu vaste quand même), et le tuk tuk cambodgien. Donc tuk tuk. Et en gros, on allait de temple en temple, en lisant les explications du National Geographic et du Lonely Planet histoire d'essayer de comprendre comment une telle grandeur a pu s'effondrer, en essayant de repérer les différentes périodes aussi. On admirait les fresques murales et les apsaras (danseuses), on se demandait comment fichtre nous allions redescendre de cette échelle (pardon escalier) à 60°, et on transpirait comme des boeufs. Et puis il y a eu ce moment très particulier que j'ai adoré : il était environ midi et la chaleur était écrasante : nous étions en février, les températures dépassaient les 35°C. Dans l'un de nos bouquins, le National je crois, il était conseillé de ne pas louper le Porte Nord, magnifique et surtout peu fréquentée. Nous nous y sommes donc rendues... bingo. Nous étions les seules touristes, et seuls quelques Cambodgiens passaient de temps à autres à vélo ou à moto, souvent avec tout un chargement à l'avant comme à l'arrière. La Porte Nord était à nous, pour nous. Le luxe ultime. Je ne m'en remets toujours pas. D'ailleurs j'ai mis plusieurs jours à me remettre de cette visite ; je ne cessais de répéter à Camille "Hé ! On été à Angkor !!!!!!!!", avec un sourire tranche papayer limite pastèque. Il revient à chaque fois que je raconte Angkor, ses pierres, ses apsaras, sa Porte Nord, ses lianes, son lever de soleil et ses nénuphars.


Angkor Wat

 Angkor Wat

 Bayon

 Angkor Thom, porte méridionale

Prasat Kravan

L'échelle à 60° de Ta Keo

Angkor Thom, porte nord

Ta Prohm

Phnom Penh 

Phnom Penh a été un choc après les petites villes tranquilles par lesquelles nous étions passées depuis Bangkok. Du mouvement partout : des motos, des taxis, des bus, des gens, ça partait dans tous les sens. Et surtout, l'ennemi tant redouté était là. Celui que vous reconnaissez à des mètres à la ronde. Celui que même vos souvenirs se rappellent précisément. Le DURIAN. Le fruit dégueulasse et puant comme un rat mort que nous avions goûté puis recraché aussi sec au Vietnam. Là, il y en avait partout sur les marchés !

Après avoir passé une nuit dans un hôtel particulièrement miteux, nous avons trouvé une sorte d'auberge de jeunesse. C'était un repère à touristes mais avec une vraie ambiance cool, qui rappelait quelque peu les backpackers australiens. De toute façon il valait mieux loger dans un lieu sympa : la chaleur écrasante qui régnait de 10h à 16H faisait qu'on y passait pas mal de temps, soit pour échapper au soleil, soit pour nous en remettre. On y a explosé notre compte "bières" (oui parce que le principe, c'est qu'on ne payait rien mais que tout allait sur la note de notre chambre). Ca pousse à la consommation...

Cela dit, nous avons quand même bravé la touffeur pour visiter un peu la ville, notamment la prison S-21 (aujourd'hui le musée Tuol Sleng). Nous en sommes sorties bien silencieuses. Cette ancienne prison, où était enfermés et torturés les opposants au régime communiste, est aujourd'hui un musée, et raconte comment en 8 années, environ 1,7 millions de gens ont disparu. Comment personne n'a réagit. Comment des hommes, des femmes et des enfants y ont cru, à cet idéal surréaliste. Comment des Occidentaux de pays sympathisants n'ont rien vu lors de leurs visites. Comment l'histoire se répète.

L'une des victimes du discuté génocide

Le confort indéniable d'une cellule

La ville de Phnom Penh n'est pas franchement agréable. Bon, Camille était aux anges parce qu'il y avait des kilomètres de fils, mais on ne comptait plus le nombre de bâtiments délabrés. Il me semble aussi que beaucoup de gens venaient nous demander de l'argent, chose quasi inexistante au Laos, pays pourtant bien plus pauvre. Est-ce parce que le tourisme est plus développé au Cambodge ? Peut-être. Et les gens sont bien moins sympas aussi. Je crois que c'est ça qui nous a marquées : bien que les Laotiens soient plus pauvres, ils n'en étaient pas moins ultra souriants et doux, tandis que les Cambodgiens que nous avons rencontrés étaient souvent désagréables. Leur histoire récente y est sans doute pour quelque chose...









En tout cas, une chose nous a bien fait rire : les travaux. Sur le bord du Mékong, on voyait des gens creuser à la pelle, sur un terre-plein central. Mais un très long terre-plein central, genre les quais à Bordeaux. Bon, peut-être un peu moins, bref. Toujours est-il qu'on ne les a jamais vus creuser à proprement parler. On les voyait surtout posés sur le manche de leurs pelles. Je pense très sincèrement qu'ils ambitionne de terminer les travaux pour 2020.

Une dernière anecdote sur le Cambodge, quand même. Notre séance d'épilation.

Comme nous avions décidé de terminer notre périple asiatique par une session plage bien méritée, nous nous sommes dit qu'une épilation des jambes, des aisselles voire même du maillot ne serait pas du luxe. Oui parce que quand on vadrouille, et ben on "s'époile" pas tous les quat' matins. Bref. Nous sommes allées nous renseigner sur les prix de deux instituts qui se trouvaient dans la rue de notre hôtel (oui, DEUX instituts dans une seule et même rue, incroyable mais vrai). Dans le premier, il était clair que nous sortions la jeune fille de sa sieste. Nous nous sommes donc dirigées vers le second institut, et avons pris rendez-vous pour l'après-midi même. Deux heures plus tard, Camille et moi étions donc chacune installée dans une cabine, séparées par une petite cloison. Au bout de 5 minutes d'attente à discuter comme si de rien n'était, quasi à poil sous nos serviettes, nous avons vu arriver les tortionnaires esthéticiennes. Depuis ce moment là, je place l'épilation cambodgienne juste derrière le massage thaï. Il a fallu que j'explique à la jeune esthéticienne qui s'occupait de moi, sous l'œil vigilant d'une dame un peu plus mûre, que pour éviter que ça fasse mal il fallait tirer la peau. "Oh, sorry sorry !" Camille était morte de rire de l'autre côté, tout en se demandant pourquoi elles s'y étaient mises à deux pour lui arracher les poils. On a toutes les deux décidé de ne pas se faire épiler le minou finalement. Question de survie.

Le lendemain, nous prenions le bateau pour Chau Doc, Vietnam. Une journée de voyage sur le Mékong avant de nous rendre à Phu Quoc, une île au sud du pays.

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